Incompétences thermiques

On a beau savoir que l’isolation était le cadet des soucis des professionnels du bâtiment, il y a quand même des choses qui choquent :
Mur non isolé, dégâts au bati

Ce mur de refend est parcouru de fissures dans l’enduit et laisse voir les joints des parpaings qui le composent. C’est un effet évident de la condensation le long des joints en ciment. L’explication est simple : ce mur n’est pas du tout isolé. De l’autre coté, c’est un grenier avec un peu de laine de verre au sol, dans lequel la VMC a rejeté pendant 20 ans l’humidité et la graisse de la maison. Thermiquement, le mur d’environ 4 m2 donne directement dehors et distribue largement le froid et la chaleur dans la grande pièce de l’étage.

L’isolation de ce mur coté grenier avec quelques plaques comme dans le reste de la maison ne présentait aucune difficulté et un coût négligeable. Ni le propriétaire, ni l’architecte ni l’entrepreneur n’ont relevé ce problème. Si pour le propriétaire, cette négligence est compréhensible (il n’était pas du tout tourné vers ce type de problème), les deux autres protagonistes ont fait preuve d’une grossière incompétence, que le propriétaire a payé pendant 20 ans en facture d’électricité et en inconfort. Le bâti en a souffert aussi, c’est visible. Reste maintenant à résoudre le problème (c’est le toit qui sera isolé, le grenier passe en partie chaude) et à réparer les dégâts.

Matériaux écologiques, à quel prix ?

Utiliser des matériaux dits écologiques en construction, tout le monde le souhaite ! Les matériaux à base de bois, de plantes (notamment les isolants) ou à base de produits recyclés (comme la ouate de cellulose, les fibres textiles) présentent de nombreux avantages aussi bien écologiques que techniques, comme le comportement à l’humidité ou la durabilité.

Actuellement, le prix d’achat des matériaux n’inclut pas le coût réel, mais uniquement une partie de son coût de fabrication et de distribution. Les coûts de l’impact environnemental de la fabrication, du transport, de destruction, de recyclage ou d’élimination sont pris en charge par la société. Les nouvelles taxes environnementales corrigeront cette anomalie à long terme, mais nous en sommes encore loin. Actuellement, les matériaux écologiques restent souvent plus coûteux que leurs équivalents synthétiques. Attention, ce n’est pas une règle : il faut étudier chaque utilisation.

En lien avec le prix du matériau, la distribution des ces matériaux est encore embryonnaire. Essayez de trouver de la laine de bois en stock chez votre vendeur de matériaux habituel ! Le fait que ces matériaux ne soient pas produits par les grands industriels du secteur contribue à leur confidentialité. Une distribution large de ces matériaux est une menace pour des industriels peu impliqués dans l’écologie des matériaux.

En plus de la faible distribution et du prix parfois élevé, la mise en oeuvre est un autre obstacle. Trop peu de professionnels sont formés à la mise en oeuvre des ces produits, ce qui a pour effet d’allonger les délais et de gonfler les prix. Une autre solution est d’importer les matériaux et/ou de demander à des professionnels étrangers d’assurer la pose. Cela n’est pas un souci dans les régions frontalières, mais le devient dans les autres.

La performance pure peut aussi freiner l’utilisation des matériaux écologiques. Difficile pour ces derniers d’égaler les coefficients thermiques et/ou la tenue mécanique des matériaux synthétiques. Le polyuréthane est un exemple typique de matériau polluant qui n’a pas de concurrent écologique. En rénovation, ce problème de performance est critique, puisqu’il faut compenser les erreurs de conception du bâtiment d’origine sans lui enlever son usage. L’épaisseur d’isolant, donc sa performance thermique, est un critère décisif.

Pour couronner le tout, les indispensables avis techniques ne sont pas toujours disponibles. Les organisations publiques chargées d’évaluer les matériaux ne semblent pas toujours pressées d’accompagner l’évolution écologique du bâtiment…

Finalement, ce qui est impressionnant, c’est que - malgré tous ces obstacles - certains arrivent à construire avec des matériaux écologiques. Rarement uniquement avec ceux-ci, mais parfois beaucoup ! Par contre, les conditions pour l’utilisation généralisée des matériaux écologiques ne sont pas remplies.

Dans notre projet, la principale utilisation de matériaux écologiques se fera dans la toiture : bois de charpente, isolation en laine de bois et ouate de cellulose. C’est peu, mais l’utilisation de matériaux écologiques ne permettaient pas d’aboutir à un maison passive à un coût raisonnable.
Il fallait choisir entre utiliser des matériaux à fort impact environnemental ou se résoudre à gaspiller de l’énergie en chauffage pendant des dizaines d’années. Les études précédentes sur les batiments à très faible consommation ont montré que pour diminuer l’impact environnemental global, la diminution de la consommation énergétique était prioritaire. Dont acte.

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